La situation de surendettement est nettement plus grave. A l’instar d’une entreprise, on considère qu’un particulier est en situation de surendettement s’il ne peut plus faire face à ses dettes non professionnelles arrivant à échéance.
Depuis la loi du 1er août 2003, dite « Loi Borloo », du nom du député à l’origine de la proposition, la procédure de traitement des situations de surendettement s’est enrichie d’une procédure de « rétablissement personnel ». Cette procédure, calquée sur le modèle de la faillite civile en vigueur en Alsace-Moselle, permet l’apurement total du passif du débiteur, à la condition que sa situation soit irrémédiablement compromise.
I. la procédure de surendettement classique
Pour pouvoir bénéficier de la procédure de traitement des situations de surendettement, il est nécessaire de remplir un certain nombre de conditions. La procédure de saisine est relativement simple, mais le traitement du dossier peut s’avérer assez lourd.
A. Conditions et dépôt du dossier
> Qui peut bénéficier de la procédure ?
Le bénéfice d’une procédure de traitement du surendettement est soumis à certaines conditions.
Tout d’abord, la situation financière du débiteur doit rendre impossible le paiement de ses dettes. Cette situation s’évalue non seulement en comparant les masses des dettes et des revenus, ainsi que du patrimoine du débiteur, mais aussi au vu de sa situation personnelle et professionnelle.
En règle générale, il est considéré qu’une personne ayant déjà utilisé le recours du rééchelonnement de ses dettes auprès de ses créanciers, et dont la situation s’est aggravée au point qu’il ne parvient plus à honorer le nouvel échéancier, est en situation de surendettement
Ensuite, il est indispensable que les dettes auxquelles le débiteur ne peut plus faire face constituent_des_dettes personnelles et familiales (loyers, crédit immobilier, crédits à la consommation, pensions alimentaires…) et non pas des dettes professionnelles. Cette procédure ne vaut donc pas pour les professionnels (professions libérales, agriculteurs, chefs d’entreprises…) qui seraient surendettés pour des créances d’ordre professionnel.
De plus, cette procédure est réservée aux personnes physiques, et non pas aux entreprises.
Enfin, votre démarche doit être sincère et montrer votre implication personnelle. Par exemple, s’il est avéré que, au cours de la période pendant laquelle votre situation s’est dégradée, vous avez sciemment aggravé votre endettement, ou dissimulé certaines sources de revenus ou certains biens, votre dossier risque fort d’être rejeté. Pour le dire simplement, vous devez montrer votre bonne foi et votre implication dans la procédure.
> Comment procéder ?
La procédure est entièrement gratuite. Aucun organisme public ou privé n’est habilité à percevoir de l’argent pour vous aider à remplir votre dossier.
En cas de difficulté pour remplir votre dossier, ou si vous voulez vous assurer de ne rien avoir oublié, faites-vous aider par le service social de votre mairie ou à une association de défense de consommateurs .
Le débiteur doit se procurer un dossier de surendettement auprès de la succursale de la Banque de France la plus proche de son domicile.
• Constitution et dépôt du dossier
Ce dossier doit contenir certaines informations obligatoires relatives à votre situation personnelle, et notamment :
- l’état civil (nom et prénom) ;
- la situation familiale (marié, célibataire, enfants…) ;
- le logement (propriétaire, locataire, occupant à titre gratuit…) ;
- la nature et le montant de toutes vos dettes et créances : pensions alimentaires à verser, crédits en cours (joindre votre échéancier, l’offre préalable, les relances qui vous ont été adressées, vos documents bancaires, contrats, autorisations de découvert, prêts familiaux et prêts aidés…) ;
- les coordonnées de vos créanciers ;
- les dettes immobilières (loyers, impôts locaux, charges diverses, factures de fluides impayées…) ;
- vos dettes fiscales impayées (impôt sur le revenu…) ;
- la nature et le montant de l’ensemble de vos ressources : ressources mobilières (revenus de placements financiers…) et ressources immobilières (loyers perçus), pensions alimentaires reçues, prestations sociales, allocations…
Une fois le dossier rempli, le débiteur doit le déposer ou l’envoyer (par lettre simple) au secrétariat de la succursale de la Banque de France la plus proche de votre domicile.
La commission vous enverra un courrier qui prendra acte de votre demande, et qui précisera que vous pourrez être entendu par elle. Ce courrier ne constitue pas une acceptation de votre dossier. Celui-ci devra être examiné pour savoir si votre situation entre dans le champ de compétence de la commission. En conséquence, vous devez toujours assurer le paiement de vos créances.
Par contre, conservez toujours une copie de votre dossier et informez au plus tôt vos créanciers de la démarche que vous avez entreprise : le gain de temps sera conséquent pour la suite.
• Examen du dossier par la commission
Comme il a été dit, le fait de déposer un dossier et de recevoir un avis de réception de la part de la commission ne signifie pas que votre dossier est accepté. Un passage en commission doit déterminer si votre dossier est recevable.
A l’issue de cet examen de recevabilité, vous recevrez une lettre recommandée vous indiquant la décision de la commission. Vos créanciers reçoivent la même.
En cas de refus (si votre demande est déclarée irrecevable), et si vous entendez contester cette décision, vous devez envoyer une lettre recommandée au secrétariat de la commission. Celle-ci transmettra votre dossier au Tribunal de Grande Instance. Vous ne serez pas forcément convoqué à une audience. Le tribunal statuera sur votre recours et vous notifiera sa décision (acceptation ou refus de votre dossier), ainsi qu’à la commission qui devra s’y plier.
B. Le dossier a été accepté : redressement de la situation
Le rôle de la commission est de définir un « plan de marche » qui doit amener le débiteur à redresser sa situation. Ce plan de redressement est établi par la commission sur la base des renseignements qui lui ont été fournis par le débiteur à partir desquels la commission dresse un bilan de la situation. Ce plan peut être adopté ou sa négociation peut aboutir à un constat de désaccord.
> L’élaboration du bilan du débiteur
Le plan de redressement est élaboré sur la base d’un bilan dressé à partir des renseignements fournis par le débiteur. Ces renseignements sont ceux décrits dans le dossier de saisine de la commission.
En plus de ces renseignements, la commission dispose d’un pouvoir d’enquête auprès des organismes publics et privés. Elle peut de ce fait obtenir des informations auprès de l’administration fiscale, des établissements de crédit et des organismes de prestations sociales. De la même manière, la commission peut être amenée à entendre le débiteur ainsi que toute personne qui pourrait l’éclairer sur sa situation.
Sur la base de ces renseignements, la commission dresse un bilan de la situation du débiteur qu’elle transmet aux créanciers mentionnés sur le dossier. Ceux-ci, s’ils constatent des erreurs ou des omissions, peuvent demander des rectifications.
Le débiteur dispose d’un délai de 20 jours pour contester le contenu du bilan. Cette contestation doit être adressée par lettre recommandée à la commission qui la transmettra au juge de l’exécution du Tribunal de Grande Instance. La lettre doit mentionner les créances contestées et leur montant, ainsi que les justificatifs prouvant le bien-fondé de la contestation.
Cette possibilité de recours est importante dans la mesure où le bilan de l’état de surendettement défini le montant définitif des sommes dues par le débiteur et qui seront donc à rembourser par lui dans le cadre de l’exécution du plan de redressement.
> Elaboration du plan de redressement
Le plan de redressement est constitué par un ensemble de mesures qui vont concerner les créanciers et le débiteur et qui vont être décidées dans une perspective d’assainissement de la situation financière de ce dernier. Ces mesures sont en général adoptées de manière consensuelle entre les créanciers et le débiteur, sous l’arbitrage de la commission. Certaines cependant, comme la suspension provisoire des voies d’exécution, sont arbitraires, car elles ont pour objet de laisser le temps à la commission d’adopter le plan de redressement en ayant une vision figée du patrimoine du débiteur.
• Les mesures impactant les créanciers
La première mesure, et certainement la plus urgente est la suspension des procédures de saisies par voie d’huissier, de saisie-arrêt et de saisie sur salaire qui seraient en cours d’exécution. Cette suspension permet en général d’éviter que la situation du débiteur n’empire.
Mais cette suspension ne concerne pas toutes les dettes : les dettes alimentaires (pensions…) doivent continuer à être versées, les procédures d’exécution qui ne compromettent pas le plan de redressement également (mais ces dernières sont plutôt rares). On notera que les réparations pécuniaires résultant de condamnations pénales ne peuvent pas non plus faire l’objet d’une suspension.
C’est la commission elle-même qui se charge de la procédure de suspension des procédures d’exécution.
Cependant, cette suspension ne peut pas excéder une année, et sera annulée jusqu’à l’adoption du plan de redressement ou jusque 15 jours suivant l’échec de la procédure de conciliation qui aurait dû aboutir à l’adoption du plan de redressement.
D’autres mesures peuvent être décidées par la commission en ce qui concerne les créanciers, comme par exemple et parmi les plus fréquentes :
- une remise de dettes ;
- un rééchelonnement de vos échéances (allongement de la durée de remboursement des emprunts…)
- la réduction de certains taux d’intérêt, voire leur suppression…
• Les mesures impactant le débiteur
Parmi les mesures les plus fréquemment retenues, on notera :
- – la vente de certains actifs non indispensables (résidence secondaire, voiture…) ;
- la fermeture de comptes d’épargne et l’utilisation des sommes qui y étaient déposées pour le paiement des dettes ;
- l’engagement du débiteur à ne plus contracter de nouveaux emprunts (mais dans la mesure où les procédures de redressement sont inscrites au FICP, il y a peu de chances qu’un établissement de crédit accorde de nouveaux prêts au débiteur, à tout le moins pendant la période d’inscription, qui est de 8 ans maximum) ;
- la mise en place d’un prélèvement automatique pour le règlement des dettes ;
- le recours régulier à un suivi par les services sociaux de la mairie, d’une association de consommateurs…
Dans les faits, la commission essaie d’aboutir à une conciliation entre les parties, sachant que les sommes qui sont consacrées au paiement des dettes doivent laisser au débiteur un minimum vital qui ne peut être inférieur au revenu minimal d’insertion (RMI). Ce montant devra être majoré de 50% si la procédure concerne un ménage.
Le plan de redressement ne peut excéder une durée de 10 ans, sauf pour les dettes relatives à des crédits immobiliers.
Dans le cas où le plan est élaboré et où les négociations aboutissent à un accord, le débiteur et les créanciers le reçoivent pour approbation. Si le débiteur ne respecte pas le contenu du plan, et à l’issue d’un délai de 15 jours suivant une lettre recommandée de l’un de ces créanciers, le plan devient caduc. Dans ce cas, et sauf si le débiteur justifie d’éléments nouveaux l’ayant empêché de tenir ses engagements, il ne pourra plus déposer de dossier devant la commission et les créanciers peuvent recourir à des voies d’exécution.
> Échec des négociations
Si les négociations échouent, un constat de désaccord est dressé dans un procès-verbal. Celui-ci est envoyé aux parties. A compter de sa réception, le débiteur dispose de 15 jours pour demander à la commission d’élaborer des recommandations.
Ces recommandations peuvent être élaborées d’autorité par la commission sans reprendre le contenu initial du plan. La commission peut aussi reprendre le contenu du plan de redressement non abouti en modifiant certaines des mesures refusées sur demande des parties.
Il est toujours possible au débiteur de contester les recommandations. Pour ce faire, adressez un courrier au juge de l’exécution du Tribunal de Grande Instance.
Si la situation du débiteur est trop dégradée pour pouvoir faire l’objet d’un plan de redressement, la commission peut décider d’une suspension des dettes pour une durée maximale de 36 mois, voire d’un effacement total ou partiel des dettes si la situation ne s’est pas améliorée à l’issue du moratoire. Ce sera notamment le cas si le débiteur n’a pas de ressources et s’il n’est propriétaire d’aucun bien saisissable.